Repères 2 pour l'animation des groupes de pratique
Sommaire
- 1 La conscience de la coresponsabilité
- 2 Recadrage, gestion des bavards ou des émotions fortes au mauvais moment
- 3 4. Phase de réalisation (besoin de sens)
- 4 Les outils de la CNV
- 5 Quelques repères sur l’écoute empathique
- 6 Quelques repères sur l’accompagnement auto-empathique (ou AAE)
- 7 Quelques différences entre Ecoute Empathique (EE) Et accompagnement Auto-Empathique (AAE)
- 8 Quelques repères sur le jeu de rôle
- 9 Quelques repères sur le jeu de rôle en mouvement
- 10 Quelques repères sur l’écoute auto-empathique
- 11 Quelques repères sur l’authenticité
La conscience de la coresponsabilité
Idées Difficultés Vérifier lorsqu’une proposition est faite si quelqu’un en a une autre Rappeler régulièrement que nous travaillons en commun Préciser et repréciser la place de l’animateur Etre vigilant de parler en « je » et le poser comme règle Recadrer avec doigté une personne qui n’est pas dans le « je » Etablir ensemble les règles et les afficher Prendre du temps au détriment du fond Rappeler les règles et les réactualiser Ne pas perdre trop de temps Rappeler que chacun est invité à s’exprimer dans la conscience que le temps est partagé Notion de temps et conscience du temps différents pour chacunConscience de sa place dans le groupe et peur de prendre trop de place Utiliser des formes de sondage qui poussent chacun à se positionner Comment prendre en compte une position minoritaire ? Poser la règle que quand quelqu’un exprime un besoin insatisfait, il fait une demande Comment le prendre en compte ? Demande ou exigence ? Prendre des temps réguliers pour gérer ses propres besoins d’empathie Suis-je capable d’auto-empathie ? de prendre d’abord un temps en silence avec moi-même ? Rappeler l’intérêt pour le groupe de se taire dans certains moments de tension Elire des gardiens : du rythme, du temps, du processus, de la demande Droit d’intervenir et comment ? Peut-on décider ensemble de gestes clairs pour ces rappels ? Faire tourner les rôles dont celui d’animateur Intervention à la place du garant, risque d’entraîner de la confusion et de la déstructuration A chaque fin d’atelier chacun exprime une demande ou un besoin pour l’atelier suivant Temps de bilan personnel après l’atelier, puis prendre le temps pour les animateurs Chacun marque personnellement la fin du centrage, lorsqu’il n’est pas guidé par un geste convenu à l’avance Après les suggestion de l’animateur pour l’atelier, s’adresser au groupe pour s’assurer que chacun a pu se positionner. Afin de vérifier la responsabilité réelle des personnes avant d’entrer dans le travail. Comment exploiter les insatisfactions ?
Recadrage, gestion des bavards ou des émotions fortes au mauvais moment
La capacité de se taire dans groupe est un signe de la maturité de celui-ci.
Face à une personne prenant beaucoup de place au mauvais moment (que nous appellerons « bavard ») lui donner de l’empathie est une manière de la recadrer. S’il y a précision dans l’utilisation des sentiments et des besoins, le plus souvent trois ou quatre reformulations suffisent.
L’animateur prend tout de suite les choses en main, puisqu’il est responsable de la bonne gestion du temps de l’atelier. Il ne s’agit pas d’être poli (la CNV vise le respect et non la politesse), donc l’animateur coupe la parole au bavard, dans le respect du vivant.
L’énergie de l’autre à ce moment là peut le bousculer. Il peut être nécessaire de se donner de l’auto-empathie avant d’intervenir, afin de s’assurer de n’être pas dans la réactivité.
L’expression de l’authenticité de l’animateur participe aussi à un recadrage. Dans une situation qui le dépasse dans un groupe, le fait d’exprimer qu’il est frustré ou démuni va souvent permettre l’évolution de la situation…
A condition qu’il prenne bien la responsabilité de ce qu’il exprime, en parlant en « je », et en posant clairement ses besoins et demandes. Sans ces conditions, l’expression de la vulnérabilité de l’animateur peut déstabiliser le groupe.
Comment arrêter le char quand il s’emballe ?
Un exemple :
1er temps : centrage
Le bavard s’emballe : Pendant quelques secondes, je me centre, je respire lentement. Quand je me sens dans mon axe, je pars sur l’empathie, je recadre. Pour rester dans ma verticalité, et vérifier de ne pas me faire trop capter par mon interlocuteur, je m’assure de rester bien droit et calé contre le dossier de ma chaise.
2e temps : phase avec le rythme et l’émotion
Pour créer le lien empathique, je porte mon attention à l’émotion sensible derrière le discours de l’autre. Au début, je ne lui propose que cette émotion : « tu es agacé, choqué ». En même temps, je me mets en phase avec le rythme accéléré de la personne et je vais lui refléter une part de ce rythme, sans créer d’emballement en moi.
3e temps : reformulation du besoin
Au moment où j’ai capté l’attention de l’autre, j’utilise le lasso du besoin pour freiner le char. Si j’obtiens un ralentissement, mais que je le vois prêt à repartir, aussitôt je reformule un autre besoin.
4e temps, si nécessaire, emploi de mon authenticité
Si ce n’est pas suffisant, j’arrête le char en partageant mon authenticité. Par exemple, en précisant que j’ai le souci de l’expression des autres membres du groupe (je cadre à partir de mes besoins dans la conscience des besoins du groupe).
Viser la cohérence pour recadrer une personne qui n’utilise pas le « je » Si je veux inviter autrui à utiliser le « je », il est rigoureux de veiller à ne pas utiliser de mon côté le « tu », car ce décalage peut crisper. Dans ce cas-ci, la rigueur dans l’expression de mon authenticité a du sens.
Par exemple : Tu viens d’utiliser le « nous », cela me fait bouillir, parce que je ne me retrouve pas dans ce que tu viens d’affirmer et je tiens au respect de l’avis de chacun. Serais-tu disposé à reformuler ce que tu viens de dire en employant le « je » ?
4. Phase de réalisation (besoin de sens)
Cette phase permet l’incorporation des outils CNV dans notre manière d’être et leur intégration dans notre quotidien. Ce processus ne peut se faire qu’à partir des situations impliquantes que nous traversons.
Seulement, la résolution de ces situations n’est pas la visée, mais la conséquence, ou le symptôme, de ce travail d’intégration. Nous serions bien embêtés si nous n’avions plus de difficultés à surmonter pour nous pousser à évoluer.
Il vaut donc la peine de rappeler régulièrement que la résolution des situations chaudes des uns ou la résorption du besoin d’empathie des autres ne sont pas les finalités d’un groupe de pratique.
Les problèmes ne sont qu’une des matières premières des groupes. A force de les travailler, les problèmes ne sont plus des problèmes, mais des opportunités d’écoute.
Certains groupes n’utilisent quasiment que l’empathie ou que le jeu de rôle. J’ai animé un groupe consacré à l’approfondissement de l‘auto-empathie. Mais je trouve dommage de trop se focaliser sur une seule forme, au risque de ne pas avoir la capacité d’employer celle qui est la plus adéquate à un instant donné.
Même si un groupe possède un outil fétiche, Jean-Philippe recommande d’avoir une connaissance de base de tous les outils de la CNV.
Les outils de la CNV
Il y en a six.
4 outils d’accompagnement :
- L’écoute empathique
- L’accompagnement auto-empathique
- Le jeu de rôle
- Le jeu de rôle en mouvement
2 outils individuels :
- L’écoute auto-empathique
- L’authenticité
L’animateur a à sentir quel est l’outil le plus pertinent à un moment donné, sans s’enfermer dans une forme. On peut changer d’outil en cours de route, suivant l’évolution de l’accompagnement.
Par exemple : commencer avec de l’empathie, parce que le demandeur est en colère, puis proposer un jeu de rôle ou un accompagnement auto-empathique dès que possible (ce qui permet une gradation dans la capacité à aller en profondeur).
Quand une personne demande à travailler sur une situation qui l’affecte, elle perd une part de discernement et c’est confortable pour les présents que l’accompagnant propose une forme.
L’animateur écoute avec empathie, mais arrête ce temps dès qu’il est au clair sur ce qu’il peut proposer. Ce temps, l’anamnèse, doit être court, car il sert essentiellement à l’animateur à choisir l’outil à proposer (il n’est utile ni à la personne demandeuse ni au groupe).
Le choix de l’outil pour l’accompagnement d’une personne:
· L’écoute empathique est le plus souple, car utilisable dans presque toutes circonstances, mais elle permet rarement un réel changement de conscience sur une situation.
· Le jeu de rôle permet d’aller plus en profondeur. Il est intéressant si quelqu’un focalise sur l’image d’un adversaire ou d’un problème, afin de l’aider à guérir de sa croyance.
· L’accompagnement auto-empathique est intéressant pour aller au fond des choses, toucher un réel lâcher prise ou aller jusqu’à la célébration d’une difficulté. Cependant, il faut que la personne demandeuse ait suffisamment de disponibilité intérieure. Il ne convient pas si elle a trop besoin d’empathie ou si elle reste accrochée à une croyance ou une situation.
· Le jeu de rôle en mouvement permet de faire évoluer des situations complexes, même si le demandeur est limité dans ses possibilités d’écoute. S’il est mal cadré, il peut demander beaucoup de temps (de une à deux heures) et nécessite à priori la participation de plusieurs joueurs.
Quelques repères sur l’écoute empathique
L’écoutant est au service de la personne écoutée. Il est aidant qu’il prenne le minimum de place, qu’il ne capte pas l’attention de l’écouté. Il a intérêt pour cela à être le plus dépouillé possible dans ses reformulations, en ne dépassant pas une douzaine de mots.
Une autre aide est de reformuler régulièrement, afin que l’écouté reste bien dans l’instant présent. Ce n’est pas de l’empathie que de revenir en arrière et d’exprimer une synthèse de ce qui a été dit. Mettre l’accent sur le ressenti le plus intense à chaque instant.
Il y a un ajustement qui se fait avec les premières reformulations, ensuite, le rythme se crée et la paire écoutant/écouté peut se poser dessus.
En tant qu’écoutant, se dire que l’on ne va nulle part et rester dans l’ouverture aux ressentis, afin qu’un cheminement organique puisse s’opérer.
Il est précieux aussi de ne pas croire savoir ce que vit l’écouté. La reformulation est à chaque fois une hypothèse, elle est un exercice d’humilité.
Idéalement, tant l’écoutant que l’écouté sont dans une attitude de disponibilité afin de laisser surgir les sentiments et besoins. C’est un cheminement naturel… ne pas créer quelque chose qui n’existerait pas, c’est-à-dire ne pas créer un nouveau chemin.
Exercices pour travailler l’empathie :
La proxémie
Formez des paires écoutant/écouté. Demandez-leur de se placer au cours de l’écoute d’abord à trente centimètres l’un de l’autre, puis un mètre trente, puis trois mètres. Inversez les rôles et partagez sur les conséquences de chaque distance.
Le message non verbal
Trouver une personne dont la langue maternelle est inconnue de la majorité des membres du groupe. Elle parle dans cette langue sur une situation qui lui tient à cœur. A tour de rôle, les membres du groupe lui donnent de l’empathie.
Variantes : · Ne reformuler que les sentiments. · Ne reformuler que les besoins.
Aller à l’essentiel
Former des paires écoutant/écouté. L’écoutant a droit à douze mots maximum par reformulation.
Sentir le bon rythme dans l’empathie
Former des paires « écoutant/écouté ». L’écoutant est invité à mettre son attention sur les moments opportuns pour ses reformulations. Pour cela, il ne doit utiliser que les phrases de la liste ci-dessous :
- Ca doit être difficile ? - C’est douloureux pour toi ? - Oh la la ! - Ca te pèse ? - Ca alors. - Waouh! - Ca te fait du bien ?
- J’entends bien. - Ah oui ! - Hum hum. - C’est chouette pour toi ? - Intéressant. - Génial ! Etc.
Variantes :
· Reformuler en utilisant les phonèmes A-A ou O-O ou A-O.
· Claquer des doigts pour indiquer les moments qui vous apparaissent opportuns pour reformuler.
· L’animateur se met à disposition de l’écoutant. Ce dernier ne parle plus, mais, quand il sent que c’est le moment, il touche l’épaule de l’animateur, qui reformule à sa place.
Ressentir le rythme naturel
Former des paires écoutant/écouté. L’écoutant ne peut utiliser qu’un mot par reformulation. Au début, seulement des sentiments, puis, seulement des besoins. Une fois que l’écoute est terminée, demander aux paires de se concerter si la transition a été appropriée.
Quelques repères sur l’accompagnement auto-empathique (ou AAE)
Le silence est le moteur de recherche.
· L’émotion est le fil rouge de la démarche.
· L’accompagnant reste le plus discret possible pour ne pas capter l’attention de l’accompagné. Par exemple, en ne croisant pas son regard et en reformulant le moins possible.
· On n’accorde pas d’importance à l’histoire, on écoute au-delà. L’accompagné, idéalement, est centré sur les ressentis suscités dans l’instant par l’évocation d’une situation.
· Si la personne accompagnée est novice avec l’AAE, lui permettre pendant cinq minutes maximum de raconter son histoire et lui donner de l’empathie, dès que possible, lui expliquer l’esprit de l’AAE et, si c’est OK pour elle, on démarre réellement l’accompagnement.
· Plus l’accompagné est décentré, plus l’accompagnant propose une émotion ou un lien avec le corps. Quand l’accompagné est centré, il ne dit que le besoin ou il se tait.
· Pendant le temps de centrage préalable à l’AAE, vérifier si l’accompagné a besoin d’être guidé pour se centrer.
· Les propositions corporelles servent à remettre la personne en lien avec ses émotions, dès qu’elle a retrouvé ce lien, lui proposer d’écouter l’émotion qui se présente. Lorsque la personne est dans le fil de ses émotions ou de ses besoins, nous ne faisons en principe pas de suggestions corporelles.
· Quand on est dans l’accueil, on ne veut plus rien changer, c’est alors que les choses changent très vite. C’est lorsqu’on est détaché que l’imprévu peut se révéler.
Exercices pour travailler l’accompagnement auto-empathique :
Créer la phase avec la personne accompagnée
Une personne se met au centre du groupe et se donne une auto-empathie silencieuse pendant quelques minutes. Chacun se relie au cheminement qu’il perçoit pour elle. A la fin, comparer les perceptions.
Variantes: Même exercice de base, mais quand un écoutant a l’impression que l’accompagné remonte dans sa tête, il le signale en levant la main.
La qualité de présence
Se mettre par paire accompagné/accompagnant. L’accompagnant prend un temps de centrage et l’accompagné lui signale quand il ressent une présence porteuse.
Ensuite, l’accompagné se donne de l’auto-empathie à voix haute et l’accompagnant lui offre sa présence en silence.
La sensibilité corporelle
Se mettre par paire. L’accompagné se relie à ses ressentis physiques et l’accompagnant lui indique dans quelle partie il a la sensation que se produit un travail.
Variantes : · Même exercice de base, mais l’accompagnant décrit les sensations physiques de l’accompagné. · Même exercice de base, mais l’accompagnant ferme les yeux.
Le détachement empathique
Former des paires. L’accompagnant prend un temps de centrage. L’accompagné se donne de l’auto-empathie à voix haute et la tâche de l’accompagnant est de le suivre tout en conservant sa qualité de centrage. S’il la perd, il demande un arrêt, le temps de la recouvrer.
Variantes : Même exercice de base, mais l’accompagnant se relie à ses sensations à l’arrière de son corps, ou dans l’espace derrière son corps, et essaie de conserver cette attention.
Quelques différences entre Ecoute Empathique (EE) Et accompagnement Auto-Empathique (AAE)
L’écoute empathique
o Une des forces de l’écoute empathique est de pouvoir s’employer dans presque toutes les situations.
o L’écouté s’adresse à l’écoutant et a tendance à vouloir lui expliquer ce dont il parle.
o Dans les premières minutes, au mieux, il y a une focalisation par l’écouté sur son histoire, la situation ou le stimulus.
o Il y a interaction entre l’écoutant et l’écouté, et il y a besoin de signaux pour marquer ce lien, par exemple le croisement des regards.
o L’écoutant investit l’espace avant.
o Il y a un rythme régulier de relance de l’écoutant pour soutenir l’écouté dans son attention, comme une vague qui va et vient.
o Les longs moments de silence ne se vivent que pendant les moments de « shift »
o « shift » : changement, nouvelle prise de conscience à partir du lien avec mes besoins profonds.
o Il n’y a jamais de questions ouvertes ni de suggestions d’écoute corporelle.
o L’EE sert à l’écoutant à clarifier l’accompagnement le plus opportun à proposer à l’écouté : la poursuite de l’écoute empathique, un accompagnement auto-empathique, un jeu de rôle.
o Le plus souvent, l’écouté n’atteint pas les niveaux de shift d’accueil et de célébration.
o Pour un travail de guérison, la durée moyenne de l’écoute empathique est plus longue que celle de l’AAE.
L’accompagnement auto-empathique
o L’accompagnement auto-empathique ne se prête pas pour une personne trop prise par ses croyances, trop attachée à son histoire ou trop coupée de son corps.
o Il demande une certaine capacité d’introspection et de l’autonomie de la personne accompagnée.
o L’accompagné porte son attention sur son ressenti intérieur et l’accompagnant l’aide à garder cette attention, tout en veillant à se faire oublier.
o L’accompagné est invité à ne plus porter son attention sur l’histoire, la situation ou le stimulus de départ, mais d’accueillir son sentiment dans l’instant, idéalement dans une écoute non intentionnelle.
o Tant que l’accompagné est en lien avec ses sentiments et ses besoins, l’accompagnant lui offre un soutien silencieux. De longs moments de silence peuvent être fréquents.
o Les changements de rythme sont plus marqués que dans une EE.
o Le lien avec les besoins profonds se fait plus rapidement que dans une EE.
o A partir d’un lien fort avec son axe, l’accompagnant n’investit pas l’espace avant, mais au contraire, l’espace arrière. Il veille à peu croiser le regard de l’accompagné, pour ne pas recréer un lien empathique.
o Quand l’accompagné perd le lien avec ses sentiments et ses besoins, ou quand il se trouve au début d’une chaîne de besoins, l’accompagnant peut poser des questions ouvertes ou faire des suggestions d’attention corporelle.
o Les niveaux de shift d’accueil et de célébration sont plus fréquemment atteints que dans une écoute empathique.
o Sa durée est d’habitude de 10 à 60 minutes.
Quelques repères sur le jeu de rôle
Exemple : Un participant parle de sa belle-mère.
L’animateur écoute, constate qu’elle pèse sur les épaules du demandeur, qui reste accroché aux problèmes qu’elle lui pose. Les conditions sont remplies pour proposer un jeu de rôle.
Il y a toujours deux possibilités de jeu de rôle :
- Extérieur. En l’occurrence avec la belle-mère du demandeur, incarnée par l’animateur.
- Intérieur. Pour cet exemple, avec un jeu entre une part qui aimerait se débarrasser de « l’emmerdeuse » et une autre qui est culpabilisée par cette idée.
Le jeu de rôle nécessite une double compétence : une d’empathie et une d’authenticité. Si l’animateur se met à la place de la belle-mère, comment traduire ses paroles et sa conduite de façon vulnérable, sans la trahir ou créer un monde artificiellement gentil ?
Il y a au moins deux manières de jouer le rôle :
Ø Une manière normative, en jouant avec réalisme l’attitude que la belle-mère a vis-à-vis de son beau-fils. Ce qui va demander au beau-fils de faire l’essentiel du travail de CNV. C’est apprenant, mais souvent bien difficile pour les participants.
Ø Une manière « girafe », en incarnant l’énergie de la personne, mais en traduisant ses sentiments et ses besoins cachés, ainsi qu’en exprimant ses défenses (si la belle-mère est tendue, elle le restera, mais arrivera à l’exprimer).
Chacun a la capacité d’incarner n’importe quel être humain, car nous avons le potentiel de tous les êtres humains en nous. Cela demande de faire confiance, de s’ouvrir à une sensibilité, de laisser venir les sentiments et les besoins.
Se laisser embarquer par le rôle consiste à le laisser émerger à l’intérieur de soi. C’est joyeux de s’approcher de la sensibilité d’autrui.
Travailler cet aspect de l’incarnation peut nous aider à nous rendre compte que nous avons du mal avec telle défense d’autrui (parce que nous recelons la même).
Le jeu de rôle est un cadeau qui nous permet de mieux nous connaître et qui nous aide à grandir.
Autre exemple de jeu de rôle avec un stimulus extérieur
Pour clarifier, prenons un autre exemple avec comme stimulus une personne qui s’est mise en colère.
Si l’animateur joue le « coléreux », il garde quelque chose de l’énergie de la colère, mais il va pouvoir parler du besoin qui est derrière. Il a gagné une capacité à se dire, mais sa difficulté à gérer son émotion reste présente.
La colère est souvent une défense, il y a derrière la tristesse, la peur ou l’impuissance.
C’est la capacité d’autonomie du demandeur qui conditionne la forme du jeu de rôle :
o S’il est très focalisé sur le stimulus, je choisis le jeu de rôle en girafe.
o S’il a peu besoin d’empathie et souhaite préparer un entretien, je peux prendre un rôle en chacal.
Le demandeur dit ce qu’il a envie de dire dans le moment présent, la situation passée n’étant qu’un point de départ pour entrer dans le présent, d’où l’inutilité d’une anamnèse longue.
Si vous voulez plus d’éléments sur le jeu de rôle, je lui ai consacré un document assez approfondi que vous trouverez à sa place alphabétique dans la rubrique « documents partagés » de mon site. Il vous suffit de cliquer sur le lien : http://www.voie-de-l-ecoute.com/03_DOCUMENTS_PARTAGES.html
Exercices pour travailler le jeu de rôle :
La phase empathique
Convenir d’une personne connue. Chacun prend un temps de centrage pour se mettre dans sa peau.
Celui qui a proposé la personne l’interviewe.
Chacun respecte ses ressentis physique et émotionnel, en se mettant dans cette peau et apprivoise une personnalité différente.
Qu’est-ce que ça fait en tant qu’homme de se retrouver dans la peau d’une femme (ou inversement) ? Quelles peuvent être les sensations physiques d’un sportif d’élite ?
Tout est contenu dans l’ouverture aux ressentis.
Variantes :
· Poursuivre avec un chat, un chien ou un autre animal. · Faites-vous le porte-parole d’une plante, d’un objet ou d’une partie de votre corps.
Se mettre à la place des « bourreaux »
Prendre une personne dont le comportement nous est insupportable.
Aller voir en profondeur la construction du système de défense qui fait qu’une personne a tué, violé ou autre, et l’expliquer au groupe… En veillant à jouer dans le respect de nos limites.
Si je suis réactivé par l’autre, c’est que je touche une limite interne. Ce qui est insupportable chez l’autre, c’est moi.
Parler pour « l’emmerdeur »
Choisir une personne dont le comportement nous emmerde.
Prendre un temps pour se mettre à sa place et parler sur soi-même à partir de sa position.
La sagesse de la vie
Incarner à tour de rôle la vie.
Prendre un temps de centrage, puis répondre aux questions du groupe, pas à partir de la tête, mais de l’inspiration de l’instant.
Quelques repères sur le jeu de rôle en mouvement
L’animateur définit avec la personne demandeuse les parties essentielles du système. Il n’est pas nécessaire d’être exhaustif, si une partie manque, cela se révélera au cours de l’interaction.
Quand les différentes parties ont été placées dans le cercle par la personne demandeuse, l’animateur l’invite à s’asseoir (sauf s’il s’est désigné comme une des parties, ce qui est envisageable dans certaines configurations) et à s’imprégner du mouvement en cours.
L’animateur questionne chaque partie sur son ressenti de l’instant, dans le sens du mouvement d’énergie, puis la personne demandeuse.
A partir de là, il va procéder à des reconfigurations du système et donner la place au besoin d’empathie le plus fort à chaque instant.
L’important pour l‘animateur est de ne pas penser à ce qui serait bon, mais de se mettre dans un état de disponibilité aux messages du système.
A partir de ce vide, ses pieds le mènent à l’un ou à l’autre, en respectant le mouvement de l’énergie.
Exercices pour travailler le jeu de rôle en mouvement :
Le positionnement dans l’espace
Une personne décrit une situation qui la touche. Ensuite, elle évoque un à un les différentes composantes de ce système.
Au fur et à mesure, celui qui le sent va se placer dans le cercle en tant que la partie évoquée.
Quand toutes les parties sont posées, elles interagissent en silence lentement entre elles.
Partager à la fin sur ce qui s’est passé.
Variante :
Les volontaires essaient à tour de rôle de placer dans l’espace les éléments de ce système. A la fin, la personne concernée fait des retours sur les différentes tentatives.
Se relier aux ressentis d’autrui
Une personne décrit une situation qui la touche.
Le groupe définit ensemble une de ses parts intérieures.
Chacun se relie à cette part et décrit les ressentis corporels qui lui viennent, puis les ressentis émotionnels et enfin les ressentis besoinnels.
Ressentir l’urgence du besoin d’empathie
Choisir un sujet qui touche trois personnes.
Elles se mettent debout face à face et elles échangent entre elles.
A tour de rôle, chacun expérimente de donner de l’empathie à celle qui en a le plus besoin à chaque instant.
L’action juste
Chacun prend un temps de centrage, puis se relie au besoin de l’instant.
Il laisse venir l’action qu’il est juste d’accomplir pour les cinq prochaines minutes.
Quelques repères sur l’écoute auto-empathique
Pour démarrer le processus d’auto-empathie, je me relie à un espace en moi de tranquillité.
Cette tranquillité est toujours potentiellement présente, quel que soit mon degré apparent d’agitation. La difficulté est de créer ou de retrouver l’accès à cette part, la plus intime de moi-même.
La disponibilité de la part écoutante va permettre l’émergence des parts écoutées. L’ouverture de cet espace ne demande pas forcément beaucoup de temps. L’auto-empathie minute (ou seconde) peut se faire tout au long de la journée.
Quand la part écoutante est vraiment sans intention et sans but, son ouverture va permettre que je me laisse faire par l’émergence des sentiments et des besoins. S’ils me surprennent dans l’instant, c’est un indice que mon attention est juste.
Il est important de pas chercher les sentiments et les besoins, parce qu’eux me cherchent déjà. Je n’ai qu’à être disponible et ils surgissent. Plus je les laisse venir, plus des besoins profonds émergent.
De même que pour une écoute empathique de l’autre, la qualité d’écoute de moi implique un certain détachement vis-à-vis de ce qui émerge. Ce recul permet d’aller au fond des choses.
Si la part écoutante se laisse trop contaminer par la tension de la part écoutée, il n’y a plus d’écoute possible. Il faut donc conserver un certain recul : j’accueille la tension, mais je ne m’identifie pas à la tension, elle reste l’objet de mon écoute.
Mais, attention, si je veux être détaché, je vais créer une nouvelle tension. Ce sera par l’accueil de ce vouloir que je me reconnecterai à mon détachement.
Il n’y a aucune hiérarchie à l’intérieur des sentiments, pas plus que de sentiments « positifs » ou «négatifs ». La joie n’est pas mieux que la tristesse. La peur n’a pas moins de sens que la tranquillité.
Muscler notre écoute, c’est développer une équanimité envers toutes les émotions et tous les sentiments. Cela permet aux sens et aux spécificités de chaque sentiment d’émerger.
L’aboutissement de tout processus d’écoute se produit quand j’accède organiquement à la tranquillité et à la célébration. Je peux vérifier que je l’ai atteint, quand j’ai spontanément l’élan de dire merci à mon stimulus. Je n’arriverai pas à cet état tant que je chercherai à y parvenir.
Par contre, j’y accède en accueillant ce qui est à chaque instant. Je retrouve ainsi mon état naturel, la sérénité, quand j’ai pris le temps d’accueillir tout ce qui est agité en moi.
Exercices pour travailler l’auto-empathie :
Ancrer la tranquillité en soi
Chacun prend un temps pour conscientiser les procédures qui l’aident à être dans la tranquillité, puis il les partage en grand groupe.
Ensuite, chacun teste pour lui-même celles qu’il apprécie le plus, en plusieurs temps de cinq minutes.
Rester avec ses sentiments
Chacun se centre, puis se relie à une situation stimulante.
Laisser venir un sentiment et, pendant cinq minutes, accueillir ce qui se passe si j’essaie de rester avec l’évolution de ce sentiment.
Etre présent là où je suis
L’animateur dispose trois chaises, les unes derrière les autres, pour chaque écoutant. Celle devant représente l’objet de l’écoute, la suivante celle de la part écoutante, la troisième celle qui accueille avec bienveillance les difficultés à s’écouter.
Chacun essaie de vivre un temps d’auto-empathie en se déplaçant d’une chaise à l’autre, suivant ce qui survient.
Le but est d’être attentif à ce qui se passe en soi et pas d’atteindre un résultat au niveau de l’écoute.
Initiation à la piste de marelle
Poser par terre trois panneaux marqués respectivement : « pensées », « sentiments » et « besoins ».
Prendre une situation et se poser sur le panneau qui correspond à notre cheminement intérieur.
Progressions :
Ajouter un panneau marqué « centrage / détachement ».
Commencer le travail d’écoute en restant au moins deux minutes sur ce panneau. Y revenir chaque fois que j’ai l’impression de perdre mon centrage ou mon détachement.
Ajouter un panneau marqué « résistances / défenses ».
Y aller quand j’ai la sensation de bloquer, d’être dans la confusion ou toute autre manifestation d’une résistance intérieure.
Quelques repères sur l’authenticité
Mon authenticité part du lien entre ce que je ressens et ce que j’exprime.
Cela me demande d’investir de l’attention pour être, autant que possible, au clair sur ce que j’éprouve. Mon authenticité est donc la continuation naturelle de mon auto-empathie.
Etre dans l’authenticité demande à la fois : · un lâcher prise sur ce que je dis (afin d’atteindre une force de spontanéité) · et un ralentissement, pour me relier à mes ressentis (sinon mon lâcher m’amènera souvent à exprimer mes conditionnements mentaux).
L’authenticité acquiert une force quand elle dépasse le choix d’une formulation et qu’elle nous permet d’incarner dans l’instant la justesse de nos ressentis intérieurs. Je peux dire dix fois la même phrase et exprimer dix réalités différentes.
Mon corps parle à travers mon expression faciale, ma position corporelle, ma tension intérieure, la tonalité de ma voix, etc.
L’authenticité devient une hygiène relationnelle quand je m’approprie mon « je », en évitant de projeter sur l’autre tout ce qui est de mon cheminement, de mes difficultés et de mes résonances au monde.
Exercices pour travailler l’authenticité :
Expérimenter la congruence
Convenir d’une situation et d’une même phrase que chacun aura à dire dans ce contexte.
A tour de rôle, chacun exprime cette phrase face à une personne jouant le stimulus.
Comparer ensuite la congruence des uns et des autres.
Prendre sa place
Se mettre par deux debout l’un en face de l’autre.
A tour de rôle, l’un fait des pas vers l’autre et s’arrête quand il a la sensation d’être à sa juste place dans l’instant.
Il exprime alors comment il se sent.
Variante :
Se mettre en mouvement en même temps et trouver une distance adéquate pour les deux.
Ressentir la justesse corporelle
Faire un jeu de rôle avec une personne à qui j’ai envie de dire non.
Tester le ressenti corporel, pour moi et pour lui, quand je m’exprime à partir de moi et quand je parle sur lui.
Variante :
Vivre le jeu de rôle debout en silence et expérimenter comment faire passer mon « non » à l’autre, en conciliant ma congruence avec l’ouverture à ses réactions.
Exprimer mes résistances
Faire un jeu de rôle avec une personne avec laquelle j’ai du mal à m’affirmer et lui parler authentiquement.
Si je ressens une difficulté, me poser sur une chaise derrière moi et me donner de l’auto-empathie.
Quand je suis au clair sur ma difficulté, m’avancer et l’exprimer.
Variante :
Chercher un mouvement correspondant le mieux à chaque besoin que j’exprime. Tester les mouvements que me proposent des observateurs.
Traduire ma vulnérabilité
Trouver les situations où j’ai du mal à exprimer ma vulnérabilité : dire une appréciation, faire part de l’amour que j’éprouve pour eux à mes proches, parler de mes peurs ou autre.
Demander à une personne de jouer le stimulus, lui donner le contexte, et m’entraîner à trouver les mots pour exprimer ce que j’éprouve ou pour partager les résistances que cela suscite en moi.
Deux petits exercices généraux :
Jeu pour enrichir le vocabulaire CNV
Créer un dialogue, avec la consigne d’employer la CNV, mais sans avoir le droit d’utiliser les mots récurrents quand nous parlons « en CNV ».
Par exemple : « j’entends » et « besoin ». Puis augmenter le nombre de mots interdits, au fur et à mesure qu’ils apparaissent ( « vraiment », « c’est important », « sentiments », etc.)
Garder la vigilance sur nos tics de langage et jouer avec les synonymes nous permet de gagner en fluidité et d’employer un langage naturel.
Présentation de la CNV
Présenter la CNV au reste du groupe, en moins de cinq minutes, en étant très attentif à ma rigueur dans l’énoncé des faits et à lier ce que je dis à mon expérience.
Pouvoir conscientiser le sens que la CNV a pour nous et en partager ce sens nous permet de gagner en clarté intérieure et d’éviter d’ajouter une nouvelle croyance à notre collection.