La joie d'être père (ou mère)/Caché dans l’escalier (2 ans 1 mois)
Nous habitons un appartement sur plusieurs étages avec un escalier pour rejoindre les différentes pièces. Dès les premiers froids, celui-ci devient rapidement glacial. J’ai donc décidé d’installer un rideau de séparation sur le modèle de ceux que l’on voit dans certains restaurants pour préserver le séjour des courants d’air. Or, depuis quelques mois, Titouan avait pris l’habitude de jouer à « caché » derrière un autre rideau masquant notre meuble à chaussures.
Un soir alors qu’il venait de finir son repas, il se dirige vers l’escalier pour descendre vers sa chambre. Vous avez compris : il s’enroule gaiment dans le rideau en criant « caché », le tout à moins de 10 cm du bord de l’escalier ! Déchiré entre l’urgence à le faire ressortir debout et la peur qu’il fasse un faux pas, j’étouffe un hurlement « non Titouan !!».
Je le saisi par les bras et le fait ressortir du rideau et, toujours submergé par ma peur, je lui intime ferment et fortement « Titouan, je ne veux pas que tu joues avec ce rideau ». Tout son corps est déjà en mouvement pour retourner se cacher, tout heureux que son père se soit agenouillé avec lui pour jouer. En même temps son regard me semble plein surprise et d’incompréhension, j’y lis en gros « comment ça, pas jouer à caché ? ».
Touché par la gaîté et l’entrain de mon bout d'chou, je radoucis ma voix et cherche à être centré sur mon besoin de le savoir en sécurité pour lui expliquer avec le maximum de sincérité et de vérité : « Titouan, le rideau est très près de l’escalier. Quand tu joues à te cacher, tu ne regardes pas toujours où tu mets les pieds. J’ai vraiment trop peur que tu tombes dans l’escalier, et si tu tombais tu te ferais vraiment très très mal. C’est pour ça que je ne veux pas que tu joues dans ce rideau. Tu comprends ? »
En même temps, je le prenais dans mes bras pour descendre l’escalier. Mû par une intuition subite, j’ajoutais « Si tu veux jouer à « caché », tu peux jouer derrière le rideau de l’armoire à chaussures ». Celle-ci étant sur le chemin de sa chambre, je le posais devant. Titouan ravi se précipita pour aller s’enrouler dans le rideau pour une partie de fou rire à jouer à « caché ».
A partir de ce jour, il attendit que je le prenne dans les bras avant de passer le rideau et descendre l’escalier tout en me disant « pas caché là, non pas caché » et en ajoutant au milieu de l’escalier « caché là » le bras tendu en direction de l’armoire à chaussures.
Je suis émerveillé de voir comment il adapte son comportement à partir du moment où il comprend, au minimum, que c’est quelque chose de très important pour moi. En même temps, je n’arrive pas à être sûr qu’il a vraiment compris la nature du danger et j’avoue que je suis terrorisé à l’idée que, si ce n’est pas le cas, l’envie de jouer puisse un jour être supérieure à l’envie de me faire plaisir et qu’il se blesse gravement en tombant.
Je me rends compte que même si j’ai de tout mon cœur envie de lui faire confiance, envie d’avoir confiance dans ses capacités, ses ressources, que je suis persuadé que sa compréhension va bien au-delà de ce qu’il est capable d’exprimer aujourd’hui avec le vocabulaire qu’il maîtrise, j’ai du mal à me débarrasser de pensées type « est-ce que tu fais bien ? Comment pourras-tu te pardonner s’il a un accident ?etc … ». Pour le moment j’ai choisi de continuer à lui faire confiance, tout en demandant à ma peur de m’inciter à rester vigilant et en alerte, au cas où…