Repères 1 pour l'animation des groupes de pratique

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Histoire de ce document

En janvier 2004, j’avais co-animé avec Charlotte Duprez Mourman et Annie Gosselin un stage sur l’animation de groupes de pratique, organisé par l’ACNV. Suite à cette formation, Alain Ducept avait rédigé un texte intitulé «Proposition de cadre à l’usage des groupes de pratique et groupes autogérés en Communication NonViolente». A l’époque, cette contribution n’avait pas été appréciée par certains responsables, si bien qu’Alain, découragé, l’avait mise de côté.


J’ai trouvé dommage que ce texte reste inutilisé et j’ai constaté que, depuis huit ans, à ma connaissance, aucun nouveau document ne circule sur ce sujet dans le réseau francophone. Sensible aux besoins de soutien et de repères exprimés par bien des pratiquants et des animateurs de groupes de pratique, j’ai décidé de reprendre ce document.


J’y ai joint un certain nombre d’apports nouveaux, utilisant les comptes-rendus élaborés par trois participantes d’une formation que j’ai donnée en janvier 2011 sur l’animation de groupes autogérés, pour l’Association CNV Anjou.


Ce texte n’apportera qu’une contribution partielle aux participants et aux animateurs de groupe de pratique, car il y aurait encore beaucoup à dire. Il est subjectif, limité par mon manque d’informations sur les questionnements de divers groupes et par mes inclinations : accent sur les ressentis, la non-directivité et la non-intentionnalité. Il est certainement appelé à évoluer rapidement. J’espère qu’il servira de base à un document plus large.


Repères généraux

Taille des groupes de pratique

La taille optimale d’un groupe pour une séance va généralement de six (pour avoir un minimum de dynamique de groupe) à douze (pour que chacun puisse avoir sa place en grand groupe) personnes présentes.

Suivant la procédure d’engagement convenu dans un groupe, le nombre effectif de membres peut être conséquemment supérieur.

Durée des séances

La durée usuelle d’une séance est de deux heures trente. L’expérience a montré qu’une durée moindre crée une pression du temps.

Par contre, il est tout à fait possible d’envisager des durées plus importantes, en intégrant une pause au milieu, afin de préserver la qualité d’attention. Cette formule, par exemple de quatre heures un samedi après-midi avec une demi-heure de pause, a le mérite de soigner la convivialité.


Fréquence des séances

La fréquence habituelle est d’une séance toutes les deux à quatre semaines. A partir de trois semaines, il peut être intéressant de prévoir des prolongements des sujets abordés, sous la forme d’exercices dans le quotidien des participants.


Contenu des séances

Les séances se composent en gros de 5 grandes parties :

1. Les partages sur l’intégration de la CNV dans les quotidiens.

2. Des exercices et jeux d’approfondissement de la CNV.

3. Les travaux d’écoute et d’expression à partir des situations concrètes amenées par les participants.

4. Des temps de prise de conscience et de retour sur la théorie.

5. L’utilisation des échanges dans le groupe comme terrain d’application de la CNV.


Espaces à disposition

Pour favoriser des temps confortables en petits groupes, le fait d’avoir deux salles à disposition est un plus.


Forme du groupe

Le groupe peut être animé par un formateur ou un transmetteur, ou sinon être autogéré.

La dernière formule ne veut pas dire que le groupe ne sera pas animé (l’absence d’une personne plus expérimentée suscitant des besoins accrus de cadre et de soutien), mais que l’animation est prise en charge par l’ensemble du groupe.


Repères de temps

On peut séparer les différentes étapes de la dynamique d’un groupe en cinq.

Cela vaut, évidemment, pour le déroulement des apprentissages en CNV. On peut identifier chaque étape en fonction du besoin « prioritaire »:

1- phase de constitution (besoin de confort)

2- phase d'écoute et d'observation (besoin d'appartenance)

3- phase de confrontation (besoin de reconnaissance)

4- phase de réalisation (besoin de sens)

5- phase de dispersion (besoin de célébration)

Bien sûr, ce déroulement n’est pas immuable. Les circonstances dans l’instant font qu’une étape censée être ultérieure précédera une autre. Ces phases donnent néanmoins une chronologie utile sur la structuration du temps d’un groupe.


Voici des précisions concernant ces différentes étapes ...


Première phase de constitution (besoin de confort)

Cette phase correspond à l’accueil des participant-e-s.


Pour répondre aux besoins de liens et de « papotage », des membres du groupe, vous pouvez convenir d’un premier rendez-vous informel avant l’heure de début de la séance.


La pression du temps peut facilement devenir source d’inconfort: si chaque participant(e) en a la possibilité, il est demandé de respecter l’horaire, en arrivant éventuellement quelques minutes avant le début de la rencontre. Ainsi, le groupe peut prendre le temps de s’installer tranquillement. Cela permet d’assurer une phase de confort respectant le rythme de toutes et tous. C’est déjà une forme de prise de responsabilité.


Exemple de fonctionnement : vous pouvez adopter le principe de "vient qui veut, quand il/elle veut, quand il/elle peut". Ce choix d’ouverture serait alors au service des besoins suivants :

- Cohérence et Souplesse (dans l’esprit du processus).

- Motivation (ainsi je suis rassuré que si les personnes viennent, c’est qu’elles n’ont rien trouvé de plus intéressant de faire ce soir-là).

Nous pouvons convenir que, si une personne arrive plus tard, elle prend le temps de s‘installer discrètement, en respectant le rythme de ce qui se vit dans le groupe au moment où elle arrive. Par exemple, si vous voyez que le groupe est indisponible pour les salutations, vous pouvez vous abstenir de saluer.

La ponctualité, quand elle est réaliste et réalisable, permet de clore cette première étape avec tous les participants, et de passer à l’étape suivante.


Seconde phase d'écoute et d'observation (besoin d'appartenance)

Ce moment sert d’abord à définir et à rappeler pourquoi nous sommes réunis ici et maintenant.


Cette phase d ‘écoute et d’observation est ensuite consacrée à la mise en place du cadre.


Nous vérifions que nous partageons les mêmes objectifs et les mêmes règles de fonctionnement dans ce groupe (besoin d'appartenance).

Le « cadre » est une aide précieuse. Dans l’idéal, il sera intégré par tout le monde au fil des rencontres.

Aussi, plus un groupe a de l’expérience, plus cette seconde phase peut s’écourter, au profit d’une architecture invisible, jusqu’au moment où cette étape est sautée. Le groupe y reviendra quand il accueillera de nouveaux membres ou quand il voudra amener un changement dans son fonctionnement. « Pourquoi sommes-nous réunis ici et maintenant? »

Les groupes de pratique et les groupes autogérés ne sont pas conçus pour résoudre des situations personnelles. Si une prise de conscience survient au cours des exercices, c’est un « bonus ».


Ils servent à soutenir les apprentissages des personnes qui ont déjà investi des ressources (énergie, temps, argent...) pour apprendre le processus de CNV.


Ils permettent de développer la conscience de nos limites et notre capacité à prendre des risques dans les relations.


A continuer d'apprendre ensemble, pour "exporter" les apprentissages dans la vie quotidienne, avec soi-même, en famille, dans les activités professionnelles, associatives ou privées.


Les groupes de pratique sont destinés aux personnes connaissant les bases du processus (qui ont suivi au minimum un module d’introduction). Ce n’est pas un espace d’initiation à la CNV...


Ce qui précède reste à nuancer : depuis plusieurs années, des personnes néophytes ont fait leur apprentissage dans des groupes de pratique...


Rappel de quelques principes de la CNV

Ces principes peuvent servir à définir ou à rappeler le cap du groupe de pratique.

ü Chacun détient la clé des difficultés qu'il rencontre (selon Carl Rogers), à la condition de pouvoir s'accueillir, ou être accueilli dans ce qu'il ressent (cette conscience contribue à donner un sens aux difficultés qui surgissent sur son chemin).

ü L'essentiel, c'est l'intention de créer une certaine qualité de relation avec moi-même et avec l'autre (selon Marshall Rosenberg).

ü Notre responsabilité dans la communication se joue pour chacune et chacun par la recherche d'un équilibre entre écoute et expression.

ü L’harmonie dans les relations passe par la prise en compte globale de ses besoins et de ceux des autres. Dans un groupe de pratique, nous sommes toutes et tous responsables du maintien d'un certain équilibre entre nos besoins personnels et les besoins du groupe.

ü La demande, dans la conscience des besoins est la clé de l’abondance (selon Guy De Beusscher).

ü Célébrer c’est grandir par la joie. Ecouter c’est grandir par la tranquillité.

ü Il y a un grand plaisir à contribuer au bien-être des autres (selon Carl Rogers). L'être humain est naturellement porté à contribuer au bien-être des autres, (l'acte de donner comble un besoin de trouver du sens à sa vie), aux conditions de se sentir en sécurité et d’être suffisamment à l'écoute de l'ensemble de ses propres besoins.


Mise en place du cadre

o Les règles sont des stratégies visant à répondre aux besoins du groupe. Elles sont discutées et définies en commun. Elles suivent l’évolution du groupe et peuvent potentiellement être modifiées à tout moment.


o Tout le monde engage sa part de responsabilité de ce qui se passe pendant les séances, quel que soit son rôle.


o Il est optimal de viser à n’avoir que trois à cinq règles de fonctionnement, afin d’éviter la lourdeur de leur gestion. Trop de règles corsètent la liberté d’expression au détriment de l’expérimentation. Les animateurs peuvent proposer celles qui font sens pour eux et sentir leur évolution.


o Mais il n’est pas forcément nécessaire de définir des règles d’emblée. Elles peuvent se créer organiquement des nécessités de l’instant. Cette élaboration est l’occasion de faire émerger l’authenticité du groupe.


o La notion d’implication est une question délicate pour bien des groupes de pratique. La plupart demandent à leurs participants d’être présents à l’essentiel des séances. Pour des groupes de moins de dix personnes, cette règle a le mérite de préserver les liens et la dynamique.


o Cependant, j’ai appliqué avec bonheur dans mes derniers groupes de pratique la règle d’engagement envers soi-même : ne venaient aux séances que les personnes persuadées qu’elles n’avaient rien de mieux à faire (et que la séance serait plus intéressante que voir un film à la télévision). Ce principe a permis des séances très intenses, avec des présents toujours motivés.


o Beaucoup de groupes procèdent à l’élection de gardiens : du temps, du rythme, des besoins, des demandes ou du processus, pour garantir une certaine rigueur dans l’expression de la CNV.


o Attention au gardien du processus : l’emploi global de la CNV est très impliquant et peut mettre la pression sur le groupe, ou freiner la pratique.


o Commencer éventuellement par un gardien des besoins, des demandes ou du rythme (travailler sur le rythme est une notion plus simple à mettre en place et, s’il est ralenti, il est plus aisé de vivre la CNV).


Les règles que je vois comme particulièrement utiles

o Respect de la confidentialité Ce qui est dit ici appartient au groupe présent, ici et maintenant. Chacune et chacun s’engagent à se taire à l’extérieur concernant les propos des autres participant(e)s.

Cette condition sert notamment à garantir la sécurité et la liberté d’expression de tous.

o Priorité à la reformulation Règle pour soi : Si je suis réactivé par ce que vient d’exprimer quelqu’un, ou si je l’ai mal compris, j’ai à le reformuler avant de lui répondre.

Règle pour tous : Signaler à un participant si j’ai l’impression qu’il a omis une reformulation pertinente et lui demander de la faire.

o Oser être authentique Si quoi que ce soit me dérange ou me fait réagir, le voir comme une opportunité et demander un temps de pratique à partir de mon authenticité. Cette règle a pour corollaire la suivante :

o Conscience et prise de responsabilité de mon besoin d’empathie Si quoi que ce soit me dérange ou me fait réagir, le voir comme une opportunité et sentir si je peux gérer mon besoin d’empathie, soit par moi-même, soit en demandant un écoutant.

o Définir un gardien du temps La proposition serait qu’au début des rencontres, chacun dise l'heure à laquelle il souhaite partir. Afin de garantir le meilleur emploi de ce temps, nous pouvons convenir de surveiller l'heure avec le soutien d'un gardien du temps.

Par exemple : le gardien du temps peut se manifester toutes les heures, et un quart d'heure avant la fin. Afin de partager cette responsabilité, nous pouvons convenir que, si le gardien du temps est trop pris (en train de vivre un jeu de rôle par exemple), un suppléant le remplacera. Cette règle a pour corollaire la suivante :

o Définir un gardien du rythme Le fait d’avoir choisi un gardien du temps peut susciter une accélération du rythme. Or, quand il y a accélération, cela amène l’attention au niveau du mental et risque de couper les participants du lien avec leurs ressentis.

Si quelqu’un veille à la conservation de la lenteur du débit et des échanges, cela va soutenir le groupe à rester dans l’emploi et à ne pas se retrouver en train de parler sur la CNV (ce qui est malheureusement une tendance récurrente chez des personnes débutantes).

Ainsi, l’action des gardiens du rythme va contrebalancer celle des gardiens du temps, nous libérant de la pression du sablier.


Exemples de règles (les titres sont des Besoins)

o Prise de responsabilité § Prévenir la personne qui reçoit en cas d’absence ou de retard

§ Parler en « je » ou à partir de soi-même.

§ Assumer ses jugements (je trouve que…)

§ Ne pas interrompre (parler un seul à la fois).

§ Essayer de m’exprimer à partir de mes sentiments et de mes besoins.

o Respect de soi-même § Possibilité de s’arrêter à tout moment.

§ Possibilité de participer ou non.

§ Chacun se charge d’écouter et de trouver la place qui est la plus appropriée pour lui.

§ Corollairement, les personnes présentes commencent à l’heure prévue.

§ Ne participer que s’il y a intérêt.

o Engagement § Devoir de se tromper.

§ Proposer des situations vécues.

§ S’impliquer émotionnellement.

o Confiance § Confidentialité : Après la session, ne faire aucun commentaire aux personnes non concernées sur ce qui a été exprimé... ou § § Après la session, ne parler de ce qui s’est passé qu’à partir de soi-même et sans mentionner les personnes impliquées.

§ Elire un gardien du temps, du processus et/ou du rythme (qui veille à signaler les accélérations du débit de la parole).

o Respect du groupe § 3 secondes de silence entre chaque intervention.

§ Reformuler la personne précédente avant de s’exprimer.

§ Ne pas quitter la salle sans en exprimer au préalable le besoin au groupe.

§ Accepter que, si je m’adresse à une personne en particulier, l’animateur puisse m’interrompre.

§ Si je fais le choix de ne pas participer, je m’arrange pour être discret : pas de bruit ni de grands mouvements.

§ Chacun gère son besoin d’empathie.

§ Essayer de donner le maximum d’attention à la personne qui s’exprime.

§ Accepter de laisser chacun exprimer ce qu’il ressent.

o Confort § Un animateur est désigné et est chargé de distribuer la parole.

o Appartenance § Priorité dans la prise de parole à celui ou celle ayant une émotion forte à exprimer.


Les centrages corporels

v Les sens de cette pratique

La pratique des centrages corporels répond à une aspiration et à une congruence profonde dans le vécu et le partage de la CNV. Ainsi, nous recherchons à développer une écoute corporelle dans le même esprit que l’écoute de la CNV.

Nous visons a priori à amplifier notre capacité d’accueil de toutes les informations à l’intérieur de notre corps : les messages corporels, les sentiments et les besoins, plutôt que d’essayer de produire un résultat positif comme la détente ou l’apaisement.

Cette pratique :

· permet de développer une conscience des niveaux d’attention, et ainsi d’être dans l’écoute du ressenti et non dans la pensée du ressenti.

· aide à ancrer la conscience que la CNV est un processus corporel et donc à éviter le fréquent quiproquo qu’elle serait une discipline verbale. Elle représente un moyen de se réapproprier l’outil corporel.

· permet de conscientiser l’importance de la présence à soi, et de vivre la contagion que cette présence induit. Elle favorise la création d’une qualité de connexion entre les membres d’un groupe.

· fait croître notre sensibilité envers notre vie intérieure et ses multiples niveaux de communication.

Le développement de notre sensibilité corporelle va permettre d’approcher la dimension sensorielle de l’auto-empathie et de s’approprier ainsi un processus vivant.

Le centrage est aussi important dans le processus d’empathie, dont il représente la première étape. En effet, il est essentiel d’être ancré en soi pour offrir à autrui une attention pleine sans se perdre dans une écoute extérieure.


v Indications pour l’animation des centrages

Il est important d’avoir conscience de l’effet que nous recherchons : · un apaisement du mental · la création d’une attention au niveau des besoins · un ralentissement du rythme · ou autre

Suivant l’objectif, non seulement le centrage proposé sera différent, mais aussi la manière de l’animer.

La visée sur le long terme avec cette pratique n’est pas de produire une détente, mais l’acquisition d’une capacité d’accueil des tensions et des détentes, ou, autrement dit, le développement d’une capacité auto-empathique.

C’est avant tout la profondeur du centrage de l’animateur, sa présence sensorielle à ce qu’il dit, qui va soutenir les membres d’un groupe dans leur liaison avec eux-mêmes.

Si nous ne sentons pas suffisamment cette qualité d’attention envers nos ressentis corporels, il vaut la peine de prendre le temps de nous centrer avant de le partager. Amplifier la capacité de centrage pour nous-mêmes aide les autres à se centrer.

Pour éviter des confusions ou des surprises inconfortables, ne nous lançons pas dans un centrage tant que nous ne l’avons pas expérimenté nous-mêmes.

Nous vous invitons à rester sensible à l’énergie de l’instant présent et à ne pas rentrer dans un schéma automatique.

Même si nous avons prévu un centrage comprenant beaucoup d’indications, si nous constatons que les mots troublent le groupe ou que la qualité de centrage est déjà forte, le silence ou une autre forme d’animation peut s’imposer.

Prenons cependant le temps de donner suffisamment de repères pendant les moments de début et de fin du centrage pour des personnes peu habituées à ce genre d’expériences.

Vous trouverez quelques exemples de centrages sur mon site Internet, dans le document « Les centrages corporels », placé dans la sous-rubrique « L’écoute corporelle et le non-verbal, elle-même dans la rubrique « documents partagés ». Il vous suffit de cliquer sur le lien :

http://www.voie-de-l-ecoute.com/03_DOCUMENTS_PARTAGES.html

Le tour de cercle

Le tour de cercle peut poser problème par le temps qu’il nécessite dès que l’on est une dizaine, ce qui épuise l’énergie des participants. Dans la pratique, il est nécessaire de le cadrer, afin qu’il ne dure pas trop et empiète sur l’atelier.

C’est particulièrement dans les groupes autogérés que la présence d’un animateur dans ce temps là s’avère précieuse. A lui de soutenir l’émergence des souhaits pour cette séance ainsi que l’expression des expériences liées à la séance précédente, tout en veillant à la concision de chacun (ou tout au moins au côté vivant de ce qui est dit) dans un souple esprit d’équité.

Très souvent, le premier à parler donne le ton : il est prudent de proposer la parole à une personne sobre dans son expression.

Des règles peuvent être définies pour éviter les débordements de temps. Par exemple, si quelqu’un s’attend à parler plus de deux minutes qu’il en fasse la demande au groupe.

Mettre beaucoup de structure peut se faire au détriment de la qualité de vie dans le groupe et, inversement, beaucoup de souplesse se fera au détriment de l’efficacité. L’équilibre est à sentir à chaque séance.

v Comment faire autrement que le tour de cercle?

Pour les prises de décision d’autres formules existent, comme de travailler en sous-groupes et faire ensuite une synthèse.

La formule «cabaret» peut être intéressante : les «pour» se mettent ensemble, les «contre» aussi, chacun des sous-groupes délègue une personne qui les représente. Les délégués se mettent au centre et de temps en temps se concertent avec leur groupe.

o Le sondage dans l’espace

Le sondage dans l’espace est une alternative intéressante au tour de cercle. Il favorise des décisions particulièrement rapides et efficaces. Il aide à conserver l’attention et d’avoir une image plus claire des questionnements des uns et des autres.

Procédure type pour choisir plusieurs situations à travailler en même temps:

§ Créer un cercle le plus vaste possible, mais suffisamment contenant, circonscrit par les participants assis.

§ Prendre un temps de centrage avec le groupe.

§ Inviter chacun à se relier à ses besoins et à clarifier ses demandes.

§ Poser la règle que tous les mouvements se font en silence. Inviter à ne parler qu’en cas de nécessité.

§ Rappeler qu’il est important de ne pas réagir avec la tête, mais de laisser le corps se positionner de lui-même (inviter chacun à faire confiance à l’intelligence de ses pieds). Pour cela, une certaine lenteur est nécessaire.

§ Proposer à une première personne de rentrer dans le cercle, de formuler une demande et d’en motiver le sens.

§ Toutes les personnes intéressées (mais pas l’animateur de l’organisation – puisqu’il tient l’énergie du cercle) se lèvent et se placent dans l’espace en fonction de l’intérêt qu’elles éprouvent pour la demande.

§ Tant qu’il reste des personnes assises, l’animateur les invite à se lever et à formuler une nouvelle demande.

§ A chaque fois, l’ensemble des personnes debout dans le cercle modifient leurs positionnements en fonction de l’évolution de leurs besoins et de leurs intérêts.

§ S’il reste des personnes assises qui n’ont pas exprimé de souhait d’atelier et qui manifestent non verbalement un malaise, l’animateur s’assure auprès d’elles qu’elles se retrouvent dans au moins une des propositions qui ont été faites.

§ Les personnes hésitantes sont invitées à continuer à se clarifier.

§ Quand toutes les personnes décidées sont debout, l’animateur vérifie s’il reste des demandes d’atelier.

§ Il obtient un premier état de la situation qu’il va confronter aux ressources d’animation à disposition.

§ Il regarde ensuite les limites des ressources disponibles :

o En nombre minimum et maximum de participants

o En espaces correspondant aux demandes ?

o En temps à disposition ?

§ A partir de ces constats, il va proposer des alternatives créatives aux personnes dont les ateliers ne sont pas possibles dans l’instant.

§ Par exemple : « Voudriez-vous voir si d’autres personnes avaient le même intérêt que vous pour la prochaine séance? » ou « Auriez-vous une idée de changement qui permettrait de vivre votre atelier avec le nombre que vous êtes ? »

§ Particulièrement à ce stade, l’animateur veille à éviter les apartés et les questionnements individuels. Il recadre et il répond en mettant l’attention sur la conscience du groupe.

§ Si la situation reste bloquée ou que l’attention remonte dans la tête, proposer éventuellement une minute de recentrage ou une pause (en invitant les participants à négocier pendant ce temps).

§ Quand le nombre le plus juste possible d’ateliers a émergé, l’animateur vérifie si quelqu’un est mal à l’aise avec l’état de la situation.

§ Avant de terminer, il précise le lieu et la durée de chaque atelier, ainsi que le moment du retour en grand groupe.


Troisième phase de confrontation (besoin de reconnaissance)

C’est une période cruciale pour la vie d’un groupe où les tensions et les différences émergent. C’est bon signe : la confiance est assez installée pour que les personnes puissent commencer à s’engueuler.

Si le groupe a suffisamment de maturité, cette émergence représente une opportunité de travail de la CNV, à partir du vécu, de la réalité des interactions.

Ce peut être une magnifique occasion de dire son authenticité, d’arriver à reformuler des messages difficiles à entendre (c’est particulièrement intéressant quand le message est censé nous concerner), de séparer ce qui appartient à l’autre et ce qui m’appartient.

Si cette période est vécue ainsi, un niveau supplémentaire de confiance est atteint dans le groupe et chacun aura pu trouver sa juste place.


v Exercices pour exploiter les malentendus, les prises de tête et les conflits :

o En cas de longs temps d’analyse ou de « parler sur la CNV »

Au signal sonore, chacun essaie de clarifier ses besoins. Quand quelqu’un y est arrivé, il lève la main. La discussion ne reprend que quand tout le monde a la main levée.

Variantes : § Au signal sonore, chacun essaie de définir la qualité de vie qu’il ressent à l’intérieur de lui (l’ennui est un des indicateurs les plus fiables du « parler sur »).

§ Limiter le temps d’intervention de chacun à un maximum de trois phrases (ou deux ou une).


o En cas de désaccord entre deux participants

Les inviter à exprimer au moins un besoin et une demande à chacune de leur intervention.

Variante : § Un troisième participant assure une médiation informelle.

§ Deux autres participants s’expriment à leurs places avec une grande vigilance au respect du processus. Les protagonistes les approuvent ou les corrigent.


o En cas de malentendu entre deux participants Leur demander qu’ils reformulent les paroles de leur vis-à-vis et qu’ils attendent pour lui répondre que celui-ci a validé la reformulation. Variante : § Leur demander de changer de chaise et d’exprimer les sentiments et les besoins de leur vis-à-vis.

o En cas de désaccord dans le groupe sur une règle, un horaire ou tout autre point Fixer un temps pendant lequel il est interdit de parler de l’objet du conflit, mais seulement des besoins derrière.